Innover dans la supervision du transport ferroviaire
13/01/2025 - 5 min. de lecture

En 2017, je participe avec Use Design à un projet pour la SNCF : notre mission est de trouver des pistes d’innovation pour l’amélioration de la supervision du transport ferroviaire. Dans un contexte de trafic en croissance, de progression de l’intermodalité, et de nouveaux usages liés aux nouveaux moyens de communication, notre équipe est chargée de réfléchir à des solutions d’interface pour d’exploitation ferroviaire pour identifier les opportunités d’amélioration. et répondre aux nouveaux défis de l’industrie ferroviaire.
Comprendre le présent pour visualiser le futur de l’exploitation ferroviaire
Les entreprises et les designers sont friands d’innovation, ce qui est bien normal. Mais mieux vous connaitrez l’état actuel des choses et leur raison d’être, plus vous serez en mesure d’innover.
Sur les rails, sur les quais, les problèmes s’interpénètrent et s’additionnent. La nature particulière du transport ferroviaire, qu’on perçoit difficilement au niveau de l’usager, produit, à la moindre avarie, un effet boule de neige qui peut se révéler très dur à contrôler, avec un état de trafic fluide très long à rétablir. Les trains prennent inexorablement du retard, les quais se remplissent, les gares saturent.
C’est le plan de transport, établi l’année précédente, qui détermine l’heure de passage précise de chaque train. C’est cet ordre des choses que l’équipe interne avec qui nous travaillons questionne avec ce projet.

Notre mission est de comprendre le métier des exploitants, et de proposer des solutions qui faciliteront la prise d’information. Quelques visites aux centres de contrôle de Denfert-Rochereau et de Saint-Lazare nous permettent de sentir la nature du métier des personnels en charge de cette supervision.
Pénétrer dans les entrailles de la SNCF est une expérience fascinante. Dans cette salle de contrôle, on peut percevoir plusieurs choses : la compagnie possède une mécanique huilée et éprouvée. Dans le même temps, le poids de cette organisation crée des angles morts : la notion de voyageur est envisagée comme un corollaire inévitable, et non comme un élément central. Le voyageur disparait sous cette obsession du gestionnaire de faire passer le bon train à la bonne heure.

S’appuyer sur le meilleur de ce qui existe
Notre objectif est d’offrir aux gestionnaires du réseau un outil qui lui permette de maintenir la fluidité du trafic, de mieux gérer les ressources internes et le matériel roulant, et d’améliorer le confort des voyageurs. On l’a vu, ce point est à améliorer au niveau de la supervision du réseau.
Plusieurs ateliers de réflexion avec la SNCF nous ont permis de filtrer nos premiers insights, et de connaitre leur pertinence. Nous avons également glané de précieuses explications sur ce que l’on avait vu sur le terrain, et sur la façon dont les acteurs du terrain percoivent leur métier et leur action.



Notre travail s’est ensuite développé selon les axes suivants :
Différentes représentations aident à visualiser la situation
En plus des vues classiques type Galite, une cartographie physique détaillée (3D) est conçue. On visualise les voies et les gares, le graphe d’occupation des voies, une vue réticulaire.
Ergonomie et lisibilité
L’interface est claire et communique (feedbacks). Malgré l’évidence, c’est le parent pauvre des outils d’exploitation observés sur le terrain.
Une interface modulaire
Un outil complet permettrait de partager une vision commune tout en permettant de s’adapter à chaque métier.
Naviguer dans le temps
C’est un élément majeur de l’outil que sa capacité à “voir” dans le futur pour pouvoir anticiper et lancer les actions nécessaires en avance de phase. L’interface rend lisible le temps t
et le temps t+1
, t+2
, t+n
.
Animations et gestes
De grandes quantités d’informations sont rendues lisibles grâce à l’animation. Des interactions gestuelles permettent d’accroitre la productivité
L’IA participe à la prise en charge et au traitement des problèmes
L’agent IA offre des recommandations, calcule les différents leviers de sortie de crises, propose des plans d’action qui aident le superviseur lors de sa prise de décision. L’enjeu est de déterminer le niveau d’intervention de cet agent.
Dispositif final
Le fruit de ces quelques semaines de travail est un film réalisé sur un dispositif dédié. Le dispositif consiste en deux écrans de 68cm de diagonale, Résolution 1920*1080. Une dalle tactile à l’horizontale, et une dalle display à la verticale. La dalle tactile horizontale permet également d’utiliser des objets physiques, posés sur l’interface.
Ce dispositif en deux parties permet de découper l’usage : voir et faire. La partie verticale permet de visualiser l’état du réseau, tandis que la partie horizontale, tactile, permet d’interagir avec le système.
Nous avons gardé le meilleur des visualisations existantes des centres de supervision, et les avons augmenté de capacités propres aux équipements récents, avec des capacités tactiles notamment. Pas d’interactions révolutionnaires, ou de bouleversement cognitif à l’horizon pour les utilisateurs.
L’innovation réside rarement une nouvelle proposition, radicale, et potentiellement déroutante pour l’utilisateur. C’est pourquoi nous avons choisi de nous attacher à certains outils, et à certaines visualisations existantes.










